Les budgets climatiques et le cas d’Oslo : un outil politique pour et par les villes
Les villes se trouvent dans une position particulière face au changement climatique : elles en sont à la fois une source, et une solution. Du moins, elles ont un fort potentiel pour jouer ce dernier rôle. Les zones urbaines, responsables de plus de 70 % des émissions mondiales de carbone en raison de leur forte concentration de population et d’activités économiques, sont également des acteurs centraux dans le déploiement de solutions climatiques transformatrices. Celles-ci nécessitent des engagements politiques et des structures de gouvernance solides qui priorisent un développement urbain (réellement) durable.
Un outil important en ce sens est le budget climatique municipal. Établir un budget des émissions de CO2 équivalentes (eq) de la même manière qu’un budget économique, rend les actions de réduction de gaz à effet de serre à court terme une partie intégrante de la planification financière de la ville. Un budget climatique relie les fonds alloués à une mesure spécifique avec les réductions de CO2eq qu’elle génère. En suivant les émissions en parallèle avec les indicateurs financiers, les villes peuvent ainsi clarifier et quantifier la cohérence de leurs décisions budgétaires avec leurs objectifs climatiques. Un budget climatique urbain est bien plus qu’un engagement symbolique : il met en priorité la réduction de CO2 en mobilisant différents services municipaux, en quantifiant les émissions autorisées et en facilitant l’allocation des coûts pour des mesures de réduction. Et surtout, il est contraignant. Comme le dit Heidi Sørensen, directrice de l’Agence climatique de la ville d’Oslo: «Le budget climatique place le climat au cœur des décisions politiques, et c’est là que la question climatique doit être».
Le cas d’Oslo est en effet utilisé comme référence dans les «cercles de budget climatique». En 2017, la capitale norvégienne est devenue l’une des premières villes à lancer un budget climatique formel – cinq ans plus tôt, ils avaientt commencé à mesurer leurs émissions. Depuis, la ville a réalisé d’importantes réductions de CO2eq – de plus de 90 % dans les opérations municipales telles que les écoles, bureaux, et parcs – notamment dans les secteurs de la construction, des transports publics et de l’énergie des bâtiments. Parmi les mesures pratiques mises en place grâce au budget climatique d’Oslo figurent des critères environnementaux plus stricts dans la commande publique (comme l’exigence de machines électriques sur les chantiers), le soutien à l’électrification des transports en commun, et l’introduction de péages visant les véhicules diesel. En fin de comptes, la ville mesure ses émissions comme le ferait une entreprise. Sauf que dans ce cas, la politique publique entre en jeu – comme le disait Mme Sørensen – et garantit la responsabilité, la rigueur et la transparence du processus. Ce cadre contraignant a permis à Oslo de poursuivre ses actions climatiques dans le temps, malgré des changements politiques.
D’autres régions expérimentent le budget climatique, comme le montre le guide du réseau C40, et son programme qui inclut des villes comme Barcelone, Londres, Montréal, et New York. Intégrer les objectifs climatiques dans une structure de gouvernance existante pourrait bien devenir essentiel pour l’action climatique des villes. Comme le dit le dicton : « Quand on veut (politiquement), on peut».