Du bien-être communautaire à la mobilité, la durabilité dans les villes nordiques l’hiver
Bien que je sois originaire d’une ville méditerranéenne, j’ai vécu près d’une décennie à Montréal, puis quelques années à Malmö. On pourrait donc dire que je suis attirée par la «nordicité». Maintenant que l’hiver approche et que je suis de nouveau basée dans ma ville natale, Barcelone, je me mets à regretter la neige, le ski de fond, le patin sur glace dans les parcs et, parfois, simplement la lumière des hivers québécois. Mais je suis consciente des tours que me joue mon cerveau, car je ne me souviens que d’un seul côté de la médaille. Parce que : des mois de températures sous zéro, de « slush », de glissades dans les rues et de (presque) se casser la hanche, d’immobilité faciale causée par le froid, ou – mon « préféré » – habiller et déshabiller des jeunes enfants à chaque fois que l’on doit sortir. Tout cela pour dire que les hivers dans les villes nordiques peuvent être difficiles, mais aussi pleins d’opportunités, à condition que l’on propose une approche intégrée de la nordicité urbaine.
Marie-Hélène Roch, artiste-chercheuse et fondatrice de Hiver en Nous au Québec, souligne sur Centdegres.ca l’importance de cultiver un état d’esprit hivernal, en le voyant comme un moment de réflexion personnelle et de lien communautaire. Roch insiste sur la nécessité de développer la «résilience saisonnière» non seulement au sein des individus, mais aussi au niveau des institutions municipales, des organisations communautaires ou des écoles. Ce changement dans le regard sur l’hiver nécessite des ajustements tant dans les habitudes quotidiennes que dans l’aménagement urbain. Les activités extérieures, les festivals d’hiver et les espaces publics conçus pour le froid peuvent favoriser la santé mentale et physique tout en renforçant le sentiment de connexion. De cette manière, adopter l’hiver comme un atout social peut améliorer à la fois le bien-être collectif et la résilience. Un exemple concret que Roch donne à ce sujet est un programme dans la région des Laurentides qui fournit des crampons gratuits aux personnes vulnérables, favorisant une marche plus sécuritaire en hiver et contribuant à lutter contre l’isolement et à encourager l’activité physique. Ou encore le cas de Garderie Nature à Chicoutimi, où les enfants profitent de bains nordiques en plein air dans de l’eau chaude, portant des bonnets et des chaussures de bain pour rester à une température confortable.
De l’autre côté de l’Atlantique, les chercheuses Kateryna Pereverza, Annelie Viksten et Moa Ribjer partagent sur Medium.com quelques aperçus de leur recherche sur les multiples imaginaires de la mobilité durable l’hiver dans les villes nordiques à travers le cas de Skellefteå, une municipalité en forte croissance au nord de la Suède. L’insoutenabilité de l’hiver dans les villes nordiques serait largement alimentée par l’augmentation de l’utilisation de la voiture individuelle durant cette saison. Cela ne rend pas seulement les rues plus congestionnées et polluées, et contribue aux émissions de gaz à effet de serre, mais cela entraîne aussi des infrastructures non durables, avec le déneigement constant, l’entretien des routes et les effets de maintenir une grande flotte de véhicules. Certaines des solutions proposées dans l’article sont axées sur l’infrastructure, telles que les pistes cyclables chauffées, ou l’exemple du récent tunnel à vélo de Fyllingsdalen dans la ville norvégienne de Bergen, un passage de trois kilomètres destiné aux cyclistes et aux piétons, déclaré comme étant «le plus long tunnel spécialement conçu pour le vélo au monde». D’autres stratégies se concentrent sur la (re)configuration de l’urbanisme afin de réduire le besoin de mobilité, comme le concept de la «ville de 15 minutes», où la majorité des services sont accessibles à des minutes de chez soi.
Que ce soit en Scandinavie ou ailleurs, ces expériences urbaines illustrent bien que la résilience, la durabilité et l’innovation peuvent aller de pair. Il ne s’agit pas seulement de survivre à l’hiver, mais de jouir et grandir à travers lui !
Crédit photo : Marie-Hélène Roch